Les systèmes de transport intelligents, École Polytechnique de Montréal

Articles du groupe MADITUC

Contributions à la modélisation totalement désagrégée des interactions entre mobilité urbaine et dynamiques spatiales

Référence:

MORENCY, Catherine (2004). Contributions à la modélisation totalement désagrégée des interactions entre mobilité urbaine et dynamiques spatiales, Thèse de doctorat, École Polytechnique de Montréal, Montréal, pages 530.

Type:
PFE, mémoires et thèses

Organisme:
École Polytechnique

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Nouvelle recherche

Résumé

Environ tous les cinq ans depuis 1970, 5% des résidents de la Grande Région de Montréal se prêtent au fardeau de répondre aux entrevues téléphoniques tenues dans le cadre des enquêtes ménages Origine-Destination et fournissent des informations détaillées à propos des déplacements qu’ils ont faits lors d’un jour spécifique d’automne. Ces enquêtes colligent des détails à propos de chaque ménage, chaque personne et chaque déplacement. En 1998, 65 227 ménages, rassemblant 164 075 personnes, ont déclaré avoir fait plus de 380 000 déplacements. En parallèle, ces mêmes résidents se soumettent au questionnaire des recensements canadiens tenus aussi tous les cinq ans, recensements qui permettent de caractériser les univers d’unités de logement, de ménages, de familles et de personnes.

Cette recherche s’intéresse aux interactions entre dynamiques spatiales et mobilité urbaine et s’inscrit dans le paradigme totalement désagrégé. Cette approche conçoit la modélisation sous une perspective informationnelle et oppose la connaissance construite à l’aide des données les plus détaillées, aux modèles de nature synthétique et agrégée.

En guise de première contribution, cette recherche propose une conceptualisation du système urbain cadrant, par le biais de dix problématiques, les enjeux de la modélisation intégrée des interactions entre dynamiques spatiales et mobilité urbaine:

A. Mesure de la mobilité quotidienne: La mobilité observée est le résultat d'un désir ou besoin comblé de participer à une activité hors domicile. Plusieurs indicateurs permettent de la caractériser: taux de mobilité, distance parcourue, parts modales, distribution temporelle, type d’activité, etc.

B. Caractérisation des tendances socio-démographiques: Les attributs de ménages et des personnes ont une incidence sur les comportements de mobilité. Les tendances lourdes telles que la motorisation croissante, la diminution de la taille des ménages ou le vieillissement de la population affectent les stratégies de déplacement.

C. Étude des stratégies de localisation résidentielle: Les ménages et personnes remplissent leur devoir de citoyen en regard d’une appartenance territoriale, d’un lieu de résidence. Le choix de ce lieu de résidence, en termes de localisation et type d’habitation, influence les comportements de mobilité.

D. Analyse des dynamiques de construction résidentielle: Les choix résidentiels des ménages sont contraints par la disponibilité d’opportunités d’habitation. L’analyse des dynamiques de construction résidentielle documente l’historique de la construction résidentielle sur le territoire et informe sur le processus de structuration du territoire urbain comme espace fixe de vie.

E. Analyse des dynamiques de localisation des lieux d'activités: Similairement, le degré de liberté des individus en termes de réalisation d’activités dépend de l’existence de lieux aptes à soutenir celles-ci : travail, études, loisir, magasinage.

F. Étude de l’utilisation des lieux d’activités: Par leurs activités quotidiennes, les individus modifient la structure spatiale des attributs socio-démographiques, généralement appréciée selon le lieu de résidence. L’étude des stratégies d’utilisation des lieux d’activités s’intéresse aux bénéficiaires des différents lieux d’activités ainsi qu’au suivi des populations actives lors d’un jour moyen.

G. Caractérisation des rythmes d’activité: L’étude des rythmes d’activités (motifs, modes, utilisation du temps) mesure l'activité quotidienne de différents segments de population. En effet, la structure des activités quotidiennes d’un individu procède de différentes contraintes et libertés, modulées par ses propres attributs (genre, âge, occupation) ainsi que par son cadre de vie (ménage d’appartenance, culture).

H. Étude des liens d’activités (relation entre lieu de domicile et lieu d’activité): Le lieu et la nature du domicile des voyageurs sont aussi des variables critiques dans l’étude de la consommation des différentes fonctions urbaines. Ces liens d’activités révèlent d’une part la perception des personnes face aux coûts de déplacement et permettent d’autre part d’apprécier les conséquences de la mobilité motorisée sur la configuration spatiale des activités urbaines régionales.

I. Caractérisation des réseaux de transport et de l’espace urbain: Cette problématique porte sur la définition de l’espace urbain sur lequel s’articulent les multiples activités quotidiennes, espace délimité par les frontières géographiques, les infrastructures routières et les services de transport en commun.

J. Mesure de l’utilisation des infrastructures de transport : Sous la perspective des réseaux de transport, la mobilité se mesure en termes de consommation de service. Cette problématique s'intéresse à l'utilisation des différentes infrastructures publiques et privées par des marchés de mobilité.

La construction de points de vue permettant d’approfondir ces différentes problématiques soulève plusieurs exigences. D’abord, la disponibilité de données n’est que l’amorce d’un processus complexe. Un cycle d’utilisation des données a été articulé afin de conformer les données sources aux exigences analytiques spécifiques. Ce cycle implique notamment des opérations de filtrage, standardisation, transformation, fusion et analyse des données, soutenues par des technologies informationnelles variées : système de gestion de bases de données, système d’information géographique, logiciel de statistique et de statistiques spatiales, fonctionnalités totalement désagrégées, tableur.

En outre, dans une recherche de méthodes plus raffinées d’exploitation des données, différentes méthodes applicables aux données spatiales (statistiques spatiales, géostatistiques, géométrie fractale) ont été expérimentées afin d’apprécier leur intérêt dans un cadre formel de modélisation intégrée des interactions urbaines. Cet effort a permis de valider l’applicabilité de plusieurs méthodes, de démontrer leur capacité à résumer la connaissance disponible dans les ensembles de données exploités et d’identifier les pistes souhaitables d’adaptation au contexte urbain.

Des multiples procédures développées, la méthodologie de fusion permettant de lier les observations d’enquêtes Origine-Destination aux plus fines entités statistiques des recensements canadiens, est la plus significative. Cette méthodologie apparaît comme une contribution importante au processus de modélisation puisqu’elle permet de construire des bases de données intégrées où les personnes et ménages échantillonnés lors des enquêtes Origine-Destination (1987, 1993 et 1998) héritent d’attributs socio-démographiques disponibles uniquement dans les recensements (1986, 1991 et 1996). Cette méthodologie implique :

-une méthode d’allocation spatiale permettant d’attribuer une zone d’influence exclusive à chaque secteur de dénombrement;

-une méthode d’association spatiale de chaque ménage échantillonné à un secteur spécifique de dénombrement ;

-une méthode de définition de distributions conjointes pour les attributs de recensements qui sont transmis aux ménages et personnes échantillonnés ;

-une méthode de pondération des ménages échantillonnés (quatre classes de taille), ce qui requiert l’application d’une méthode d’agrégation spatiale basée sur l’adjacence ;

-une méthode de transmission d’attributs aux ménages et personnes soutenant notamment la pondération propre à chaque classe de ménages.

Cette méthodologie présente l’avantage de s’opérer à un haut niveau de résolution spatiale et de s’appliquer uniformément pour les trois couples de données, fait non négligeable puisqu’à ce jour aucune pondération comparable n’existait.

Finalement, les ensembles de données fusionnées sont mis à l’épreuve pour documenter les dix problématiques cadrant le système urbain. Cette section considérable de la thèse est un effort de conceptualisation de points de vue analytiques, d’intégration de technologies informationnelles pour représenter les phénomènes urbains et d’enrichissement de la connaissance pouvant être tirée des données utilisées, classiquement, pour soutenir les modèles de prévision de la demande.

gbisaillon@polymtl.ca 2025-05-12 20:41:32